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Neuf Palestiniens tués lors d’un raid israélien en Cisjordanie

Israël, qui occupe la Cisjordanie depuis 1967 en violation du droit international, mène des attaques quasi quotidiennes à travers ce territoire palestinien. KEYSTONE/AP/Mahmoud Illean sda-ats

(Keystone-ATS) Neuf Palestiniens ont été tués jeudi à Jénine lors d’un raid israélien présenté par l’armée comme une opération contre des activistes islamistes dans le camp de réfugiés de cette ville du nord de la Cisjordanie occupée.

L’Autorité palestinienne a accusé les soldats d’avoir tiré du gaz lacrymogène à l’intérieur de l’unité pédiatrique d’un hôpital, ce que l’armée a démenti. Dans la foulée, elle a annoncé mettre fin à la coordination sécuritaire avec Israël,

Au total, neuf personnes parmi lesquelles « une femme âgée » ont été tuées et 20 blessées, dont quatre grièvement, au cours de cette incursion militaire, selon le ministère palestinien de la Santé.

Les Nations unies n’ont pas recensé un bilan aussi élevé en une seule opération israélienne en Cisjordanie depuis qu’elles ont commencé à comptabiliser en 2005 les victimes du conflit israélo-palestinien en Israël et dans les Territoires palestiniens.

Un porte-parole militaire israélien a indiqué que l’armée avait mené dans le camp « une opération de contre-terrorisme » ciblant l’organisation armée Djihad islamique, impliquée dans de nombreuses attaques anti-israéliennes.

Lacrymogène

Avant de se retirer, les forces israéliennes ont « délibérément tiré des grenades de gaz lacrymogène » dans le service pédiatrique de l’Hôpital gouvernemental de Jénine, « provoquant l’asphyxie de certains enfants », a affirmé la ministre palestinienne de la Santé, Mai al-Kaila.

« Personne n’a tiré du gaz lacrymogène volontairement dans un hôpital (…) mais l’opération se déroulait non loin de l’hôpital et il est possible que du gaz lacrymogène soit entré par une fenêtre ouverte », a affirmé à l’AFP un porte-parole militaire israélien.

L’armée israélienne avait auparavant rapporté avoir tiré sur plusieurs « terroristes », sur fond d’échanges de coups de feu dans le camp.

Aucun soldat n’a été blessé, a-t-elle ajouté.

Plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées en début d’après-midi à Jénine pour les funérailles des neuf Palestiniens, dont les dépouilles ont été enveloppées dans le drapeau palestinien, ont constaté des journalistes de l’AFP.

« Massacre »

En fin de matinée, des secouristes s’affairaient dans des gravats dans le camp de réfugiés, où les murs de certains bâtiments ont été noircis par des incendies, a constaté un photographe de l’AFP.

Le camp, datant de 1953, est une ville dans la ville et abrite près de 20’000 réfugiés, selon l’Unrwa, l’agence de l’ONU chargée des réfugiés palestiniens.

En mai 2022, la journaliste palestino-américaine Shireen Abu Akleh, vedette de la chaîne Al Jazeera, y avait été tuée alors qu’elle couvrait un raid israélien.

L’armée israélienne, qui occupe la Cisjordanie depuis 1967, mène des raids quasi quotidiens à travers ce territoire palestinien, particulièrement dans les secteurs de Jénine et Naplouse (nord), bastions de factions palestiniennes armées.

« L’armée israélienne détruit tout et tire sur tout ce qui bouge », a déclaré à l’AFP le gouverneur adjoint de Jénine, Kamal Abou al-Roub.

La ministre palestinienne de la Santé a demandé l’organisation d’une « réunion d’urgence » avec le Comité international de la Croix-Rouge et l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Sollicitées par l’AFP, ces organisations n’ont pas commenté.

« Je suis profondément inquiet et attristé par le cycle de violence continu en Cisjordanie occupée », a réagi dans un communiqué l’émissaire de l’ONU pour le Proche-Orient, Tor Wennesland.

Nabil Abou Roudeina, porte-parole du président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, a dénoncé « un massacre perpétré par le gouvernement d’occupation israélien ».

« L’occupation paiera le prix du massacre qu’elle a perpétré » et « la réponse de la résistance ne se fera pas attendre », a promis dans un communiqué Saleh al-Arouri, haut cadre du Hamas, mouvement islamiste palestinien au pouvoir dans la bande de Gaza.

Coordination sécuritaire dénoncée

« A la lumière des agressions répétées contre notre peuple et des violations d’accords signés, notamment sécuritaires, nous considérons que la coordination sécuritaire avec le gouvernement d’occupation israélien cesse d’exister à partir de maintenant », a indiqué dans un communiqué le bureau du président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas.

L’Autorité palestinienne avait déjà pris une décision similaire en mai 2020 pour protester contre un projet israélien d’annexion de pans de la Cisjordanie, territoire palestinien occupé par l’armée israélienne depuis 1967.

La coordination sécuritaire entre Israéliens et Palestiniens – héritée des accord de paix d’Oslo (1993) ayant débouché sur la création de l’Autorité palestinienne – avait repris en novembre 2020. Sa suspension avait eu un effet notamment sur les transferts de patients palestiniens vers des hôpitaux israéliens.

Diplomatie

Le premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, et le ministre de la Défense, Yoav Gallant, doivent chacun effectuer une « évaluation sécuritaire », d’après leurs bureaux.

Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken se rendra en Egypte dimanche, puis en Israël et Cisjordanie. Il rencontrera le nouveau premier ministre israélien Benjamin Netanyahu ainsi que le dirigeant de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, selon un communiqué.

Il insistera auprès des deux parties sur « la nécessité urgente de prendre des mesures de désescalade des tensions afin de mettre fin au cycle de violences qui a coûté la vie à trop de personnes innocentes », ajoute le texte.

Les décès de jeudi portent à 29 le nombre de Palestiniens, civils ou membres de groupes armés, tués depuis le début de l’année dans des violences avec des forces ou des civils israéliens.

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