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Pas de réhabilitation des condamnés antifascistes de 1933

Un monument rend hommage à Genève aux victimes de la fusillade contre des manifestants antifascistes le 9 novembre 1932. Les Chambres fédérales ont refusé de réhabiliter les responsables de la manifestation (archives). KEYSTONE/MARTIAL TREZZINI sda-ats

(Keystone-ATS) Les sept personnes condamnées pour la manifestation antifasciste tragique du 9 novembre 1932 à Genève ne seront pas réhabilitées par l’Assemblée fédérale. Suivant le Conseil des Etats, le National s’y est opposé jeudi.

La Chambre du peuple a refusé de donner suite, par 113 voix contre 54, à une initiative cantonale genevoise. La majorité estime que les manifestants ont été condamnés dans le respect des principes de l’Etat de droit: ils l’ont été pour avoir refusé d’obtempérer aux ordres de la police et non pour avoir manifesté. Une réhabilitation porterait atteinte aux attributions de pouvoir judiciaire.

La gauche y voit en revanche un geste politique qui permettrait de régler une controverse pendante depuis des décennies et de réconcilier la population genevoise avec son histoire. Pour Genève comme pour l’armée, engagée pour la seule fois de l’histoire contre la population civile, il s’agit d’un traumatisme, a souligné Lisa Mazzone (Verts/GE).

L’initiative cantonale demandait l’annulation de la condamnation de Léon Nicole, Auguste Millasson, Francis-Auguste Lebet, Jules Daviet, Albert Wütrich, Francis Baeriswyl et Edmond Isaak par une cour d’assises fédérale le 3 juin 1933. Ces personnes avaient été défendues par Jacques Dicker, l’arrière grand-père de l’écrivain Joël Dicker.

Tensions genevoises

La tension était vive dans les années 1930 à Genève, sur fond de montée du totalitarisme en Europe, de crise économique et de chômage. L’Union nationale, parti d’extrême droite de Georges Oltramare, a appelé à tenir le 9 novembre 1932 une réunion pour mettre en accusation publique les dirigeants socialistes genevois.

Une manifestation a été organisée par le PS. Le Conseil d’Etat en a appelé à l’armée pour le maintien de l’ordre public. Le bataillon provenant de Lausanne était constitué de jeunes recrues. De 4000 à 5000 personnes étaient réunies à Plainpalais.

La confusion était grande. On craignait une émeute révolutionnaire. L’armée a ouvert le feu. Treize personnes ont été tuées, dont une majorité de passants, et 65 blessées.

Sept organisateurs ont ensuite été condamnés à des peines allant de quatre à six mois de prison. Une fois relâché, Léon Nicole a repris la direction du Parti socialiste genevois et est devenu président du Conseil d’Etat le 1er décembre 1933. Genève a connu le premier gouvernement à majorité de gauche en Suisse. Les socialistes ont emporté 45 sièges au Grand Conseil.

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