Une élection et des espoirs pour l’économie du Jura
Le 24 octobre, les Jurassiens sont appelés à élire leur Gouvernement et leur Parlement. Avec la mise en place de nouvelles voies de communications, le développement économique, représente un des grands enjeux de ces élections. Le point sur un canton qui s’affirme.
Le Jura? Un territoire lointain et coupé du monde, endormi sur ses pâturages immaculés. Un «trou», où il fait bon vivre uniquement pour un cheval des franches-montagnes. Ou, alors, un fief d’indépendantistes, allusion à tous les vigoureux défenseurs d’un Jura indépendant du canton de Berne. Les clichés sur le plus jeune des cantons suisses (créé en 1979) sont pluriels et vivaces.
Le Jura colporte plusieurs images, parmi elles, celle d’un canton périphérique et éloigné. Ainsi, avec l’ouverture fin 2011 de la gare TGV Belfort-Montbéliart, qui placera Porrentruy à deux heures de Paris et l’achèvement en 2016 de l’autoroute A16 Transjurane qui reliera Boncourt à Bienne, le canton entend doper son attractivité.
«Aujourd’hui, dans les conditions cadre pour le développement d’une région, l’accessibilité figure au premier plan. Un chef d’entreprise qui travaille avec plusieurs firmes à travers l’Europe, viendra s’implanter dans une région qui lui permet de relier différents points clés en un minimum de temps», relève Charles Juillard, président du gouvernement jurassien.
Opportunités à saisir
Si ces nouvelles voies de communication ne représentent pas la panacée pour le décollage du Jura, le canton entend en profiter au maximum pour développer les entreprises endogènes et attirer de nouvelles entités. Le projet du gouvernement jurassien de créer de nouvelles zones d’activités pour attirer les entreprises, avec la possibilité d’obtenir un permis de construire en 15 jours, s’inscrit dans cette optique.
«Le Jura a toujours souffert de son enclavement. Je place de grands espoirs sur l’ouverture offerte par ces nouvelles voies de communication. Mais il ne suffit pas de les regarder arriver, il convient de développer les politiques qui vont avec, pour attirer de nouveaux habitants et investisseurs», remarque Jean-François Roth, ancien ministre jurassien de l’Economie et de la Coopération et président du Conseil d’administration de la radio-télévision suisse romande (RTSR).
Dans un canton de 70’000 habitants, avec un taux de chômage de 5% (en septembre 2010) contre 3,6% en moyenne nationale, travailler au développement économique et créer des emplois représente effectivement une nécessité. «La création d’emplois, permettrait aussi d’attirer des contribuables et d’élargir l’assiette fiscale. Ce qui nous permettrait de baisser la pression fiscale qui est beaucoup trop lourde, en particulier pour la classe moyenne», note Charles Juillard.
La collaboration avec Bâle
Pour étoffer et diversifier son tissu économique, le Jura a choisi de se tourner vers Bâle. Il y a une année, le canton a rejoint BaselArea, organisme de promotion économique des deux demi-cantons de Bâle-Ville et de Bâle-Campagne.
Les cantons du Jura et de Bâle entretiennent des rapports particuliers. Avec une grande proximité, en matière de distance mais également d’histoire, puisque le Jura actuel rassemble trois districts de l’Ancien Evêché de Bâle.
Mais si le canton fait les yeux doux à la métropole voisine, c’est surtout pour ses atouts économiques, en particulier dans les sciences de la vie. Un secteur dans lequel le Jura souhaite se profiler, en se spécialisant dans les medtechs, les technologies médicales.
«Le pôle bâlois est très important. Un tiers de la valeur des exportations suisses provient de la région bâloise, et cette région compte environ 10’000 chercheurs. Et dans les sciences de la vie, Bâle représente un pôle mondial», relève Yann Barth, ancien responsable de la stratégie de développement économique du canton du Jura et actuel directeur de Creapole, une structure chargée d’aller chercher des starts-up proposant des projets novateurs et de coacher des entreprises locales.
Les sciences de la vie, promesse d’avenir
Les sciences de la vie représentent un fort potentiel de croissance économique pour le Jura. Dans le district de Délémont, des zones d’activité économique, focalisées sur ce secteur ont été développées. Au début 2011, Creapole fêtera d’ailleurs la création d’un premier bâtiment entièrement dédié aux medtechs. Un pas important dans le domaine des sciences de la vie que la structure va renforcer, en lançant le 12 novembre une initiative sur les medtechs. Celle-ci visera à encourager les entreprises souhaitant se convertir aux technologies médicales et à attirer des starts-ups proposant des innovations dans ce secteur.
«On s’est rendu compte qu’une quarantaine d’entreprises jurassiennes possédaient les compétences et la volonté de se lancer dans les technologies médicales. Puis, nous avons analysé le marché de manière globale et nous avons vu que les technologies médicales ont en Suisse une prévision de 12% de croissance», note Yann Barth.
Et le canton, qui possède des compétences importantes dans la microtechnique, a du personnel qualifié pour assurer la main d’œuvre dans ce secteur. Sans compter que le gouvernement souhaite encourager la formation dans les métiers techniques, notamment en établissant des liens plus étroits entre la Haute Ecole Arc et l’Université technique proche de Belfort.
La formation, la création d’emplois, le développement économique, autant de défis pour le gouvernement. A l’avenir, le Jura devra agir sur plusieurs plans pour se développer. «Le canton doit s’ouvrir, se projeter vers l’avenir et sortir de son ‘immaturité’», conclut Yann Barth.
Le 1er tour de l’élection du Gouvernement et du Parlement dans le canton du Jura aura lieu le 24 octobre. Un deuxième tour est prévu le 14 novembre en cas de ballotage.
Les électeurs choisissent les candidats sur la base de listes fournies par les différents partis.
L’élection du Gouvernement se déroule selon le système majoritaire à deux tours. Le Parlement est élu selon le système de la représentation proportionnelle
Le Gouvernement jurassien représente le pouvoir exécutif cantonal. Il est composé de cinq membres, élus pour cinq ans.
Le Parlement jurassien représente le pouvoir législatif cantonal. Il est composé de soixante députés, élus pour cinq ans.
1815: le Congrès de Vienne attribue l’Evêché de Bâle au canton de Berne. L’ancienne principauté des princes-évêques comptait sept districts, Porrentruy, Delémont, les Franches-Montagnes, Moutier, Courtelary, La Neuveville et Laufon.
Dès les années 50: montée en puissance du mouvement séparatiste.
23 juin 1974: premier plébiscite. La majorité accepte la création du canton du Jura. Mais seuls les districts de Delémont, Porrentruy et des Franches-Montagnes s’expriment en faveur d’une séparation. Ceux du Sud s’y opposent. Ils le confirmeront quelques mois plus tard.
24 septembre 1978: le peuple suisse accepte par 82,3% de «oui» la création du nouveau canton constitué des districts de Delémont, de Porrentruy et des Franches-Montagnes.
1er janvier 1979: le canton du Jura entre en souveraineté.
Début des années 1990 : naissance dans l’esprit de Jacques Hirt, ancien maire de La Neuveville, de l’idée d’un supercanton de l’Arc jurassien. Avec le regroupement du Jura, des trois districts du Jura bernois et le canton de Neuchâtel.
25 mars 1994: signature par les cantons du Jura et de Berne sous l’égide de la Confédération de l’Accord du 25 mars instituant l’Assemblée interjurassienne (AIJ), institution de réconcilation.
4 mai 2009: Après deux ans de travaux sur l’avenir institutionnel de la région jurassienne, l’AIJ dévoile un rapport qui marque sa préférence pour le projet d’un nouveau canton formé du Jura et des trois districts du Jura bernois, comptant six communes. La capitale de ce canton serait Moutier.
Juin 2010: Le Gouvernement et le Parlement jurassien marquent leur opposition à un projet de supercanton de l’Arc jurassien. Le gouvernement préconise par contre une votation dans le Jura et le Jura bernois, pour la création d’un canton à six districts.
7 octobre 2010: Les partisans d’un supercanton de l’Arc jurassien lancent un manifeste.
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