Des perspectives suisses en 10 langues

Yves Lambert, sur les traces de Raymond son père

L'alpiniste Yves Lambert (à g.) avec sa mère et Jean-Jacques Asper, membre de l'expédition de 1952. Keystone Archive

L'an dernier, cinquante ans exactement après la tentative manquée de son père Raymond, Yves Lambert est parvenu au sommet de l'Everest.

Un acte symbolique et de mémoire qu’il explique à Mathias Froidevaux. Interview.

swissinfo: Qu’avez-vous ressenti lorsque vous êtes arrivé au sommet du «Toit du monde»?

Yves Lambert: C’est la montagne la plus haute du monde, et donc le rêve de tout alpiniste. De manière générale, je ne considère pas l’ascension de ce sommet comme une grande aventure.

Mais c’était un événement important pour moi, en raison du parcours de mon père. J’ai en effet vécu une belle émotion à partir de 8600m d’altitude, c’est-à-dire à l’endroit où mon père a dû renoncer. C’était en 1952.

Mais je n’ai pas eu la larme à l’œil lorsque je suis arrivé au sommet. Le manque d’oxygène fait que nos facultés intellectuelles diminuent et nous sommes moins sensibles.

De plus, il faut rester très concentré pour la descente. C’est en général le moment où ont lieu les accidents.

swissinfo: Comment votre père vous parlait-il de son aventure et de sa décision de renoncer à 250 mètres du sommet?

Y.L. : Il n’a jamais ressenti son aventure comme un échec. Durant cette tentative en compagnie de ses amis du club de l’Androsace, il a vraiment donné son maximum.

Ils étaient à ce point fatigués qu’ils avaient conscience d’être parvenus à leurs limites physiques. Et puis, le temps se gâtait.

Ils auraient bien sûr souhaité être les premiers à atteindre le sommet. Mais ils ne pouvaient pas avoir de regrets au vu des conditions du moment. Au contraire, je crois qu’ils étaient très fiers de ce qu’ils avaient réalisé.

swissinfo: Avaient-ils le sentiment d’avoir participé à leur manière à la conquête du sommet?

Y.L. : Mon père évoquait toujours le jeu de la courte-échelle où chacun monte sur l’expérience des autres. Sur le versant népalais, les Suisses ont vraiment apporté leur concours en ouvrant près de 2/3 de l’itinéraire.

Sur le côté tibétain, ce sont les Britanniques qui ont fait l’essentiel du travail.

swissinfo: Lorsque vous êtes parvenus au sommet l’an dernier quelle voie avez-vous emprunté?

Nous sommes passés par l’itinéraire qu’avaient suivi mon père et Tenzing Norgay il y a 51 ans. Pour achever leur parcours.

swissinfo: Des centaines d’alpinistes fêtent en ce moment le cinquantième anniversaire de la première ascension. Divers records assez hétéroclites sont battus, quel est votre commentaire?

Y.L. : Je pense que le sommet est victime de son succès. Ces tentatives de records sont parfois assez surprenantes. Et leur finalité, avant tout commerciale, peut se terminer par des drames.

Interview swissinfo: Mathias Froidevaux

En conformité avec les normes du JTI

Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative

Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !

Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision