Des perspectives suisses en 10 langues

Tuberculose: les prisons, viviers pour les souches multirésistantes

Le risque de contracter une tuberculose multirésistante en prison est 100 fois plus élevé qu'à l'extérieur (image d'illustration). KEYSTONE/AP/DAVID GOLDMAN sda-ats

(Keystone-ATS) Les souches multirésistantes de la tuberculose peuvent acquérir une virulence accrue par une deuxième mutation. Les prisons jouent un rôle central en tant que sites de transmission, a démontré une équipe de recherche helvético-géorgienne en Géorgie.

De nombreux médicaments sont impuissants face aux bactéries résistantes aux antibiotiques, ce qui représente toutefois un inconvénient pour les agents pathogènes. Les mutations génétiques qui entraînent une résistance peuvent nuire à leur virulence. Les bactéries peuvent toutefois subir une deuxième mutation, dite compensatoire et ainsi retrouver leur capacité de transmission.

Des chercheurs viennent de démontrer empiriquement ce mécanisme pour la première fois en Géorgie dans le cas de l’agent pathogène de la tuberculose, mycobacterium tuberculosis. Selon leur étude, publiée dans la revue scientifique “Nature Medicine”, les souches multirésistantes transmises de personne à personne y ont causé 63% des infections.

Dans d’autres pays, ces souches représentent une proportion négligeable des infections, écrivent l’Université de Bâle et l’institut tropical et de santé publique suisse (Swiss TPH) dans un communiqué.

“Hotspots” dans les prisons

Les prisons géorgiennes, souvent surpeuplées et mal ventilées, se sont révélées être des foyers de transmission. “Le risque de contracter une tuberculose multirésistante en prison est 100 fois plus élevé que pour une personne vivant hors des murs de la prison”, a déclaré l’un des auteurs de l’étude, le microbiologiste Sébastien Gagneux, qui travaille à l’université de Bâle et au Swiss TPH.

Les chercheurs ont également constaté que les agents pathogènes présentant des mutations compensatoires ont une capacité de transmission 30% plus élevée. Les prisons sont un terrain fertile pour ces germes dangereux.

Comme la plupart des prisonniers sont libérés à un moment ou à un autre, ils transportent les germes multirésistants à l’extérieur. Selon l’étude, environ un tiers des cas de tuberculose multirésistante en Géorgie sont liés à un passage en prison.

Peu d’argent est cependant consacré à la recherche de médicaments pour lutter contre cette maladie infectieuse mortelle, alors que des résistances aux médicaments récemment mis au point ont déjà été détectées. “La lutte contre la tuberculose multirésistante est une course constante contre le temps”, prévient M. Gagneux.

https://doi.org/10.1038/s41591-021-01358-x

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision