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NXP/Qualcomm: échec de la fusion sur fond de guerre commerciale

Qualcomm a annoncé la fin de son offre sur NXP "avec effet immédiat", enterrant un projet à rebondissements, annoncé en 2016 et qui aurait constitué l'un des plus gros rachats du secteur (archives). KEYSTONE/AP/Gregory Bull sda-ats

(Keystone-ATS) Qualcomm a renoncé à mettre la main sur son concurrent néerlandais NXP. Le groupe américain de semi-conducteurs n’est pas parvenu à obtenir le feu vert des autorités chinoises, la transaction faisant les frais de la guerre commerciale entre Pékin et Washington.

Qualcomm a annoncé jeudi dans un communiqué la fin de l’opération « avec effet immédiat », enterrant un projet à rebondissements, annoncé en 2016 et qui aurait constitué l’un des plus gros rachats du secteur. Le patron du groupe, Steve Mollenkopf, avait prévenu quelques heures plus tôt qu’il jetterait l’éponge si les autorités chinoises ne donnaient pas leur feu vert avant la date butoir pour cette transaction.

Qualcomm, spécialisé dans les composants pour téléphones portables, espérait initialement boucler fin 2017 ce rachat destiné à étendre ses activités aux marchés porteurs de l’automobile et des objets connectés. Mais la transaction a connu de nombreux retards en raison de problèmes réglementaires et semble avoir in fine été victime du conflit commercial entre la Chine et les Etats-Unis, qui s’affrontent à coups de droits de douane réciproques et sont en concurrence frontale dans le domaine technologique.

Selon la presse américaine, ce dossier était bien une des données de l’équation dans le bras de fer entre les deux puissances, même si responsables chinois et américains se sont bien gardés de le confirmer. Interrogé plus de trois heures après l’expiration du délai, le porte-parole du ministère chinois du Commerce, Gao Feng, a même assuré que ce dossier n’avait « rien à voir avec les frictions commerciales sino-américaines ».

Déception américaine…et chinoise

« Je suis très déçu qu’ils n’aient pas eu l’accord du régulateur », a déclaré le secrétaire américain au Trésor, Steven Mnuchin, tout en assurant « ne pas savoir pourquoi » cette décision avait été prise. De son côté, l’Administration chinoise d’Etat pour la supervision du marché (SAMR), qui ne s’était pas exprimée jeudi, a semblé vendredi rejeter la faute sur les entreprises elles-mêmes: elle a jugé « regrettable » l’abandon du projet et s’est dit prête « à poursuivre les discussions » avec Qualcomm jusqu’à mi-octobre.

En tout état de cause, cet échec laisse les deux groupes dans l’incertitude, même si leurs responsables ont voulu rassurer clients et investisseurs. M. Mollenkopf a assuré que « la stratégie de base » du groupe, « qui consiste à propulser les technologies Qualcomm dans des secteurs à plus forte croissance, rest(ait) inchangée ».

Le groupe américain a également annoncé un programme de rachat d’actions de 30 milliards de dollars (29,5 milliards de francs), de quoi consoler les actionnaires. NXP a reconnu que faute de fusion, « nous n’aurons pas les mêmes capacités » technologiques concernant par exemple la conduite autonome, selon les termes de son directeur financier Peter Kelly lors d’une conférence téléphonique.

« Nous sommes confiants pour l’avenir en tant qu’entreprise indépendante », a néanmoins déclaré son patron, Richard Clemmer. Avec cet échec, Qualcomm doit verser dès jeudi une indemnité de rupture de 2 milliards de dollars et NXP a confirmé jeudi avoir déjà reçu les fonds.

Problèmes réglementaires

Le mariage s’était déjà heurté à des problèmes réglementaires. Dans des transactions de grande ampleur et ayant potentiellement un impact sur plusieurs marchés, elles doivent recevoir l’aval de différents régulateurs dans le monde.

Le projet avait fini par obtenir souvent avec difficultés, l’autorisation des instances réglementaires de plusieurs pays. La Commission européenne avait ouvert en 2017 une enquête sur cette fusion entre les deux géants, avant de finalement l’autoriser en janvier.

En février, Qualcomm avait relevé son offre de rachat sur NXP au grand dam d’un autre fabricant de semi-conducteurs, Broadcom, qui avait lui-même lancé une offre publique d’achat hostile sur Qualcomm. La Maison Blanche, qui arguait de menaces pour la sécurité nationale, avait finalement bloqué l’opération.

Washington estimait que le rachat de Qualcomm par Broadcom – alors basé à Singapour – aiderait des entreprises chinoises comme Huawei à dominer le marché stratégique de l’internet mobile ultra rapide, la 5G. Qualcomm, qui pèse autour de 90 milliards de dollars en Bourse, est régulièrement aux prises avec les autorités de la concurrence.

Le groupe a été mis à l’amende dans plusieurs pays ou régions comme en Corée du Sud, en Chine, à Taïwan ou dans l’Union européenne. Autre mauvaise nouvelle pour Qualcomm, il a indiqué mercredi soir que ses puces n’équiperaient sans doute pas le prochain iPhone d’Apple. Les deux groupes sont en litige depuis plus d’un an et demi.

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